Le point sur la procédure de conciliation
Être entrepreneur, c’est aussi savoir anticiper les difficultés de son activité, afin de mieux les surmonter. Qu’en est-il à ce sujet de la procédure de conciliation ? A quoi sert-elle exactement ?
Qu’est-ce que la procédure de conciliation ?
Le but. La procédure de conciliation a pour objectif de permettre à une entreprise mise en difficulté de trouver un accord amiable avec ses principaux créanciers, en vue de pérenniser la poursuite de son activité.
« Prévenir plutôt que guérir ». La procédure de conciliation est une procédure « préventive », ce qui signifie qu’elle vise à anticiper la gestion des difficultés d’une entreprise avant que celles-ci ne rendent impossible la poursuite de son activité.
Quel avantage ? A l’instar du dispositif existant dans le cadre du mandat ad hoc, la procédure de conciliation ne fait l’objet d’aucune mesure de publicité, et toute personne qui est appelée à y participer est tenue à une obligation de confidentialité.
Concrètement, cela veut dire que l’ouverture de la procédure n’est pas portée à la connaissance du public, ni des fournisseurs ou des créanciers de l’entreprise qui n’y prennent pas part. Ce qui peut constituer un atout de taille pour conserver leur confiance !
Quel point de vigilance ? L’ouverture de la procédure de conciliation ne suspend pas les poursuites individuelles des créanciers contre l’entreprise (appelée « débiteur »). Cela signifie qu’en principe, malgré la mise en place de cette procédure, les créanciers peuvent saisir le juge à l’encontre de l’entreprise pour obtenir le paiement de leurs dettes.
Procédure de conciliation : à qui peut-elle profiter ?
La procédure de conciliation est ouverte à tous les professionnels qui exercent une activité commerciale, artisanale ou indépendante (y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou règlementaire ou dont le titre est protégé) et qui rencontrent des difficultés (d’ordre juridique, économique ou financière) avérées ou prévisibles.
Attention ! Pour être éligible à la procédure de conciliation, l’entreprise (appelée « débiteur ») ne doit pas se trouver en état de « cessation des paiements » depuis plus de 45 jours. Pour rappel, on parle d’état de « cessation des paiements » quand une entreprise ne peut plus faire face à ses dettes exigibles avec ses liquidités disponibles.
Vigilance en matière agricole ! Les personnes qui exercent une activité agricole ne sont pas éligibles à la procédure de conciliation de droit commun : elles relèvent en effet d’une procédure spécifique.
Procédure de conciliation : comment ça marche ?
Qui peut demander son ouverture ?
Seul le débiteur rencontrant des difficultés dans la poursuite de son activité peut saisir le président du tribunal compétent en vue de l’ouverture d’une procédure de conciliation.
Comment faire ? Dans sa requête, il doit exposer sa situation économique, financière, sociale et patrimoniale, ses besoins de financement mais également les moyens dont il dispose pour faire face à ses difficultés.
Tribunal compétent. Le tribunal compétent pour traiter la demande diffère selon l’activité du débiteur :
- s’il s’agit d’une activité commerciale ou artisanale, le tribunal de commerce est compétent ;
- pour toute autre activité, c’est le tribunal judiciaire qui sera compétent.
Une fois saisi, le tribunal examine la demande et ouvre, s’il l’estime opportun, la procédure de conciliation. Dans ce cadre, il désigne un conciliateur.
A noter : le débiteur peut lui-même proposer le nom d’un conciliateur.
Conciliateur : quelle(s) mission(s) ?
Le conciliateur est chargé de trouver un accord amiable entre l’entreprise et ses principaux créanciers. En ce sens, il peut émettre des propositions en vue de trouver un consensus, mais également des suggestions pour permettre à l’entreprise de poursuivre son activité économique et de maintenir son emploi.
Pour l’exercice de sa mission le conciliateur peut obtenir du débiteur tout renseignement qu’il juge utile et a connaissance de tous les renseignements transmis au tribunal.
A noter. Le conciliateur doit rendre compte au président du tribunal de l’avancée de sa mission. Il peut, à cette fin, formuler des observations sur les diligences du débiteur.
Quels pouvoirs pour le tribunal ?
Au cours de la procédure de conciliation, le président du tribunal peut se faire communiquer tout renseignement qui lui permet d’apprécier la situation économique, financière, sociale et patrimoniale du débiteur, notamment par divers professionnels (commissaires aux comptes, experts-comptables, notaires, membres et représentants du personnel, etc.).
A noter. Il peut aussi faire intervenir l’expert de son choix, afin que celui-ci établisse un rapport sur la situation économique, financière, sociale et patrimoniale du débiteur.
Procédure de conciliation : combien de temps ?
En principe, la mission du conciliateur est limitée à 4 mois. Cette durée peut toutefois être prorogée, si le conciliateur le demande, sans toutefois que la durée totale de la procédure ne puisse excéder 5 mois.
Procédure de conciliation : qui doit être mis au courant ?
La décision qui ouvre la procédure de conciliation doit être communiquée :
- au ministère public ;
- aux commissaires aux comptes, si le débiteur est soumis au contrôle légal de ses comptes ;
- à l’ordre professionnel ou à l’autorité compétente dont relève le débiteur, si celui-ci exerce une profession libérale soumise à un statut législatif ou règlementaire ou dont le titre est protégé.
En revanche, le comité social et économique (CSE) de l’entreprise n’a pas à être informé de l’ouverture de la procédure de conciliation.
Procédure de conciliation : quelle(s) issue(s) ?
On l’a dit, le but du conciliateur est de parvenir à la conclusion d’un accord entre l’entreprise débitrice et ses créanciers prévoyant, notamment, des délais ou des remises de dettes.
Quelles sont les issues possibles ?
Différentes issues à la procédure de conciliation sont ainsi possibles :
- aucun accord n’est trouvé entre le débiteur et ses créanciers ; dans ce cas, le conciliateur fait un rapport au président du tribunal, qui met fin à sa mission et à la procédure ;
- un accord est trouvé entre l’entreprise et ses créanciers.
Dans cette dernière hypothèse, 2 cas de figure peuvent se présenter :
- soit le président du tribunal constate l’accord trouvé entre les parties et lui donne « force exécutoire » ; en d’autres termes, cela signifie qu’il donne à l’accord le pouvoir d’être mis à exécution par l’une ou l’autre des parties;le constat de l’accord ne fait l’objet d’aucune publicité et reste donc confidentiel ;
- soit le tribunal homologue l’accord sur demande du débiteur, sous réserve du respect de 3 conditions :
- le débiteur n’est pas en cessation des paiements, ou l’accord conclu y met fin ;
- le contenu de l’accord est de nature à garantir la poursuite de l’activité de l’entreprise ;
- l’accord signé ne porte pas atteinte aux intérêts des créanciers qui ne l’ont pas signé.
Constat et homologation de l’accord : quel(s) point(s) commun(s)?
Le constat et l’homologation de l’accord trouvé entre l’entreprise et ses créanciers ont le même effet : ils permettent, l’un et l’autre, que la justice reconnaisse l’existence de l’accord. En outre, ils donnent lieu à la suspension individuelle des poursuites engagées par les créanciers de l’entreprise, pendant toute la durée de son exécution.
Toutefois, ces 2 procédures sont légèrement différentes, puisque :
- elles obéissent à des règles de publicité différentes : à la différence du constat , l’homologation de l’accord fait l’objet de plusieurs formalités de publicité (notamment une insertion au Bodacc) ;
- seule l’homologation de l’accord par le tribunal met fin à l’interdiction bancaire de l’entreprise, c’est-à-dire à son interdiction d’émettre des chèques –, et confère certains avantages aux créanciers signataires en cas de mise en œuvre ultérieure d’une procédure collective;
- le CSE de l’entreprise doit être informé de l’accord trouvé avec les créanciers lorsque celui-ci fait l’objet d’une homologation.
A noter. Lorsque l’accord trouvé est constaté ou homologué par le tribunal, le conciliateur peut être désigné comme mandataire à l’exécution de l’accord. Il doit alors veiller à la bonne exécution de l’accord.
Attention ! Le constat ou l’homologation de l’accord met fin à la procédure de conciliation, de même que l’ouverture d’une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire.
En conclusion
La procédure de conciliation peut être mise en place, sous conditions, lorsqu’une entreprise fait face à des difficultés dans la poursuite de son entreprise. Son principal avantage est d’être confidentielle : sa mise en œuvre peut donc permettre de surmonter les difficultés rencontrées sans fragiliser la relation de confiance entretenue avec les partenaires !
Sources :
– Arrêt de la Cour de cassation, 3e chambre civile, du 10 décembre 2008, n° 07-19.899 (pas de suspension des poursuites individuelles des créanciers à l’ouverture d’une procédure de conciliation)
– Article L 611-4 et suivants du Code de commerce
– Article R 611-22 et suivants du Code de commerce
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