Les amortissements dérogatoires : application facultative
Les amortissements dérogatoires résultent de l’application de textes fiscaux. Ils peuvent, dans certains cas, s’appliquer au libre choix des entreprises. Compta-Facile s’attarde ici sur les modalités d’application et de comptabilisation des amortissements dérogatoires facultatifs.
Comptabilisation des amortissements dérogatoires facultatifs en cas de recours au mode fiscal dégressif
Comme nous l’avions évoqué dans notre article sur la comptabilisation des amortissements comptables, les entreprises peuvent, sous conditions et pour certains biens seulement, pratiquer un amortissement fiscal selon le mode dégressif. Ce mode d’amortissement permet d’amortir plus rapidement les biens durant leurs premières années d’utilisation. En comptabilité, la fraction d’amortissements ne correspondant pas à l’amortissement tel qu’il serait calculé selon le mode linéaire doit être comptabilisée en amortissements dérogatoires.
Exemple : une entreprise achète un matériel industriel neuf le 1er janvier N pour 6 000 €. Elle compte l’amortir sur 5 ans (clôture des comptes au 31 décembre de chaque année). Elle souhaite pratiquer un amortissement dégressif sur ce bien. Il convient de comparer, dans un premier temps, le plan d’amortissement selon chacun des modes. Dès que l’amortissement dégressif est inférieur à l’amortissement linéaire, il est nécessaire de réajuster le plan d’amortissement et d’utiliser le mode linéaire calculé sur la valeur résiduelle du bien sur la durée restante.
(1) 6 000 x ( 1 / 5 ) x 1,75
(2) 6 000 x (1 / 5 )
(3) 3 900 x ( 1 / 5 ) x 1,75
On remarque qu’à la fin de l’année 3, l’annuité dégressive (887) est inférieure à l’annuité calculée selon le mode linéaire (1 200). Le plan d’amortissement va donc être recalculé sur un mode linéaire selon la durée restante à courir (2 ans) et sur la valeur résiduelle de l’immobilisation à la fin de la troisième année (1 648) soit 824 euros par an (1 648 / 2).
Voici le tableau d’amortissement définitif :
L’amortissement dérogatoire est donc la différence entre l’amortissement dégressif fiscal et l’amortissement économique calculé selon le mode linéaire.
Comptabilisation d’un amortissement dérogatoire fiscal exceptionnel
Fiscalement, certains biens peuvent bénéficier d’un amortissement exceptionnel sur une durée de douze ou vingt quatre mois. Attention toutefois, cette disposition est uniquement d’ordre fiscal. En comptabilité, l’entreprise doit déterminer, le cas échéant, la durée d’utilisation réelle de ces biens.
Les immobilisations pouvant bénéficier de cet amortissement fiscal exceptionnel sont notamment constituées des logiciels acquis et des sites Internet acquis (cette forme d’amortissement a été supprimée pour toutes les acquisitions effectuées au cours des exercices ouverts depuis le 1er janvier 2017), des imprimantes 3D acquises ou créées et des robots industriels achetés ou fabriqués. La fraction d’amortissements excédant la dotation économique doit être comptabilisée en amortissements dérogatoires.
Comptabilisation des amortissements dérogatoires facultatifs pour les Petites et Moyennes Entreprises (PME)
En théorie, les entreprises doivent obligatoirement estimer la durée d’utilisation réelle de chaque immobilisation. Celle-ci dépend de l’utilisation faite du bien (intensive ou non), de son activité, de sa stratégie vis-à-vis du bien (revente à moyen ou long terme).
Cependant, pour les Petites et Moyennes Entreprises (PME), l’administration fiscale autorise à ne pas rechercher ces durées et à appliquer les durées fiscales généralement admises selon la nature de l’activité exercée par l’entreprise (avec une tolérance de 20 % accordée, en général, par l’administration, sous réserve de justifications précises). Ainsi, aucun amortissement dérogatoire ne devra être comptabilisé (la dotation aux amortissements peut être enregistrée en totalité en exploitation). Pour être qualifiée de PME, l’entreprise doit satisfaire au moins deux des trois critères suivants :
- le total bilan n’excède pas 3 650 000 € (seuil dorénavant fixé à 4 000 000 €) ;
- le chiffre d’affaires hors taxes n’excède pas 7 300 000 € (seuil dorénavant fixé à 8 000 000 €) ;
- l’entreprise compte au maximum 50 salariés.
Cependant, rien n’empêche les PME d’amortir les biens non décomposables selon leurs durées réelles d’utilisation (propres à leur activité) et de constater, le cas échéant, des amortissements dérogatoires pour la fraction (fiscale) des dotations aux amortissements excédant ceux calculés selon le mode linéaire.
Attention : cette mesure de simplification ne s’applique que pour les biens non décomposables. Les biens décomposables (cas de la structure et des composants) sont exclus de cette disposition. De plus, elle ne vise que la durée d’amortissement et le mode d’amortissement. Par conséquent, sont exclus de cette mesure les biens ayant une valeur résiduelle ainsi que les immobilisations bénéficiant de l’approche par composants. Dans ces trois derniers cas, l’entreprise est dans l’obligation de constater des amortissements dérogatoires. Pour obtenir plus d’informations, vous pouvez consulter notre article : les amortissements dérogatoires obligatoires.
Comptabilisation des amortissements dérogatoires facultatifs
Comme nous l’avons abordé dans notre précédent article, les écritures suivantes doivent être comptabilisées :
Lorsque l’entreprise dote ses amortissements dérogatoires :
- On débite le compte 68725 « Dotations aux amortissements dérogatoires »,
- Et on crédite le compte 145 « Provisions réglementées – amortissements dérogatoires ».
Lorsque l’entreprise reprend ses amortissements dérogatoires :
- On débite le compte 145 « Provisions réglementées – amortissements dérogatoires »,
- Et on crédite le compte 78725 « Reprises sur provisions réglementées – amortissements dérogatoires ».
Amortissements dérogatoires et informations dans l’annexe
Lorsque l’entreprise a recours aux amortissements dérogatoires, elle doit insérer des informations particulières dans son annexe. Ces informations ont été détaillées dans notre article « les amortissements dérogatoires obligatoires ».
Conclusion : La comptabilisation d’amortissements dérogatoires facultatifs (lorsque l’entreprise n’est pas obligée d’en comptabiliser) trouve un intérêt lorsque l’entreprise considère que ses immobilisations s’amortissent plus rapidement durant les premières années de leur utilisation. Elle va ainsi bénéficier d’un montant d’amortissement déductible maximal au début du plan d’amortissement. L’amortissement sera donc moins important en « fin de vie » du bien.
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2 commentaires
Boucaud
Bonjour et merci d'aborder ce sujet,
Je cherche des réponses pour prendre des décisions.
La situation
Je suis gérant majoritaire d'une SARL Unipersonnelle. Capital social en numéraire de 5 000€. Je dispose de 100% des parts.
J'ai financé sur ma trésorerie la création d'un site internet qui sera le premier site (à ma connaissance) à offrir un service précis. Celui-ci m'apporte une réelle valeur ajoutée.
Le développement du site m'a actuellement coûté 2700€ (pour 1 coût estimé chez des concurrents estimés au bas mots à 50 000 €).
J'ai 2 entrepreneur qui travaillent sur le projet.
Le montant des devis étaient de 10 000€.
Question 1 : puis-je augmenter mon capital social du montant dépensé ou de la valeur réelle du site internet ?
Question 2 : grâce à votre article, j'ai cru comprendre que je pouvais amortir mes dépenses. Comment en être sûr ? Les services des impôts pourraient-ils répondre à cette question ?
Question 3 : je souhaiterais payer la différence (soit 7300€) au 2 entrepreneurs en part social. Est-ce possible ?
Enfin, je souhaiterais faire ça proprement. Qui me conseilleriez-vous d'aller voir ? (avocat, fiscaliste, CFE..) ?
Vous remerciant par avance pour votre participation et restant à votre disposition pour répondre à vos questions.
Cordialement.
Thibaut Clermont
Bonjour,
Si j'ai bien compris, la construction de votre site Internet a été financée par votre société directement. Tout d'abord, je vous invite à consulter un de nos articles traitant des modalités de comptabilisation des sites Internet (certaines dépenses doivent être immobilisées alors que d'autres doivent obligatoirement figurer en charges). Voici la répondre à vos questions :
1/ Dans la mesure où votre site Internet a été financé par votre société, il ne peut venir augmenter directement votre capital social. De plus, il est impossible de pratiquer une réévaluation libre puisqu'il s'agit d'une immobilisation incorporelle. La seule option qui vous reste est la suivante : attendre que votre site Internet vous procure du résultat supplémentaire, ne pas distribuer ce résultat (donc le porter en réserves facultatives par exemple) puis procéder à une augmentation de capital par incorporation de réserves.
2/ Je vous invite à consulter l'article cité ci-dessus. Une fraction de l'acquisition (s'il s'agit d'un site Internet actif) peut, sous conditions, être immobilisée et amortie. Attention : certaines dépenses sont obligatoirement des charges. Pour obtenir plus d'informations au niveau fiscal, vous pouvez consulter le BOFIP : Distinction entre éléments d'actif et charges -Dépenses de recherche et développement de création de
site internet (BIC).
3/ Ces entrepreneurs n'ont pas facturé votre société pour la totalité de la valeur du site Internet ? Attention, cela me semble extrêmement risqué fiscalement... Je vous invite à prendre contact directement avec votre Expert-Comptable sur ce point (ou un avocat si vous n'avez pas d'expert-comptable).
J'espère avoir répondu à vos interrogations. Bonne journée. Cordialement, Thibaut CLERMONT.
Benrami
Bonjour,
J'ai une question sur le cas d'un déficit réalisé dans le cadre d'un contrat à terme .
Exemple : un contrat s’étale sur 4 exercice , la perte future est rattachée au résultat du premier exercice comptable. Faut-il comptabiliser la perte totale des 3 exercices suivants dans le premier exercice et neutraliser progressivement les années suivantes ou constater seulement la perte imputable à chaque exercice ?
Merci.
Thibaut Clermont
Bonjour,
Une publication séparée répond de façon exhaustive à vos interrogations : la gestion des contrats à long terme. Les deux méthodes existantes sont présentées : la méthode à l'avancement et la méthode à l'achèvement. Bonne journée. Cordialement, Thibaut CLERMONT.